Le site et ses initiateurs
Ce site a pour ambition de vous initier en douceur, citoyens, patients ou soignants, à une approche critique et raisonnée de la médecine. Nous avons essayé de le rendre le plus convivial et pratique possible.
Certains auront reconnu l’emblème choisi sur la bannière comme étant Socrate car il ne s’agit pas tant, sur ce site, de donner des réponses que de favoriser le questionnement des lecteurs.
Il est d’abord basé sur des articles, courts ou longs, pour la plupart parus d’abord sur twitter1Twitter est un réseau social qui permet à l’utilisateur de publier des messages courts (tweets) n’excédant pas 280 caractères (ce qui explique l’emploi fréquent d’abréviations). Un thread tweeter est une série de tweets qui se succèdent, émis par un même auteur pour former un contenu plus long. L’auteur peut d’ailleurs numéroter chaque tweet pour les ordonner. et qui sont donc généralement faciles à lire. D’autres sources alimentent le site notamment des prises de positions publiques soutenues par les auteurs du site. Vous pouvez naviguer parmi différents thèmes selon vos centres d’intérêts. Le site s’enrichira au fur et à mesure, et pourquoi pas avec des contributions extérieures.
Vos remarques pour l’améliorer sont les bienvenues.
Les initiateurs du site sont des professionnels de santé : Claudina Michal-Teitelbaum, médecin PMI (rédactrice) et Zohan, généraliste anonyme (mise en forme du site). Tous deux déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts avec les industries de santé et refusent la visite médicale. Le site n’est financé que par leurs fonds personnels.
Corinne Challand nous a ensuite rejoints dans l’animation et la mise en forme du site.
Deux visions de la médecine ?
Il semblerait que nous soyons à la croisée des chemins dans l’histoire de l’humanité et que nous ayons bien besoin de prendre un peu de recul alors que le rythme des progrès techniques semble s’accélérer avec l’annonce incessante d’ « innovations » et de « révolutions » telles celles du Big data et de l’intelligence artificielle.
Il existe actuellement une polarisation des courants de pensée vis-à-vis des évolutions des problématiques de santé.
Le courant dominant accepte sans réserves le discours du triomphe annoncé et imparable de la technique sur la maladie et sur la mort. Il est porté par les leaders d’opinion, des médecins réputés dont il serait sacrilège de remettre en question la parole.
A l’autre extrême, un courant de pensée populaire rejette en bloc une médecine considérée désormais comme technicienne, déshumanisée et sous l’influence d’intérêts commerciaux et prétend y substituer des soins, qualifiés d’alternatifs ou doux par opposition à une médecine qui serait « dure ».
Ces deux perspectives, où ne se reconnaissent probablement pas complètement une majorité des citoyens, ne sont pas si antagonistes qu’elles pourraient le paraître. Elles partagent désormais une tendance à la médicalisation de tous les aspects de la vie, chaque bien-portant étant, de leur point de vue, un malade qui s’ignore, ainsi qu’une propension à faire des allégations arbitraires quant aux bénéfices des produits et techniques utilisés.
Prévention quaternaire
Cette tendance à vouloir étendre constamment le domaine du pathologique, de ce qui relève d’une approche et de techniques thérapeutique ou préventives de plus en plus envahissantes et invasives, entraîne un phénomène relativement récent qui est la surmédicalisation. La surmédicalisation elle-même entraîne des risques sanitaires inédits.
Il faudrait donc être en mesure de comparer ces risques à ceux des maladies que la médecine prétend prévenir ou traiter. La généralisation des dépistages de masse de plus en plus nombreux en est une illustration. Le disease mongering ou fabrication de maladies en est une autre.
De là naît la nécessité d’une prévention quaternaire qui est le volet de la prévention qui se propose d’éviter ces risques inutiles liés à l’utilisation à mauvais escient de la médecine.
Prise de conscience…insuffisante
Plusieurs mouvements, associations, conférences, campagnes tels que preventing overdiagnosis, choosing wisely, less is more, sont nés du constat d’une inadéquation croissante entre l’évolution récente de la médecine et les besoins des patients et de la santé publique. Des médecins, notamment des spécialistes, jouissant d’une reconnaissance académique se sont impliqués et ont pris position pour dénoncer cette tendance.
En France, le milieu académique, à l’exception des médecins généralistes et professeurs en médecine générale est resté largement hermétique à ces questionnements et, tout en prétendant fonder les pratiques médicales sur l’Evidence-based medicine (EBM) et la rationalité scientifique, a continué à tourner le dos à ce qui en fait le fondement, à savoir la construction autonome d’une pensée critique. C’est ainsi que la plupart des médecins persistent à s’en remettre à l’argument d’autorité pour justifier leurs choix préventifs ou thérapeutiques : « les experts disent que… ». Cette position de révérence envers la parole des experts était appelée avec ironie eminence based medecine par les fondateurs de l’EBM.
Si certains mots vous paraissent peu familiers c’est aussi, peut-être, parce qu’ils sont encore peu utilisés et que les concepts qu’ils recouvrent sont encore peu reconnus et enseignés. Ces mots ont été inventés pour décrire un constat partagé par des médecins ayant une vision critique de la médecine. Il est important de les comprendre car toute réalité ou phénomène qui ne peut être représenté par des mots est réputé ne pas exister.
A l’inverse, les mots peuvent être utilisés, manipulés, pour générer des réalités factices, c’est-à-dire des illusions, souvent dans un objectif commercial. C’est un des rôles joués par le marketing en médecine.
La médecine n’est pas un commerce comme un autre
Dans le commerce en général c’est le degré de satisfaction du client qui mesure le succès d’un produit. Une transaction commerciale réussie est celle où le client s’estime satisfait et pense “en avoir eu pour son argent ».
Il ne peut pas en être de même en médecine. Et si l’EBM prend soin de préciser que les préférences du patient doivent être prises en compte dans les décisions prises, la subjectivité qui préside à l’idée de satisfaction peut être mise sous influence et dévoyée.
Car comme l’a si bien dit Margaret Mc Cartney, médecin écossais et chroniqueuse au British Medical Journal, à propos des patients :
“People who get what they want don’t necessarily get what they need; people who get what they need don’t necessarily get what they want.”
Les personnes qui obtiennent ce qu’ils veulent n’auront pas nécessairement ce dont ils auraient besoin, les personnes qui obtiennent ce dont ils ont besoin n’obtiennent pas nécessairement ce qu’ils auraient voulu.
Autrement dit nos désirs, nos croyance et nos représentations de consommateurs se télescopent souvent avec nos besoins en tant que patients.
Au-delà des désirs individuels, deux aspects légitiment la rationalisation des soins. D’une part, l’exercice du droit équitable d’accès au système de santé ne se concrétise que dans des systèmes assurantiels universels et solidaires ce qui implique que chacun participe pour que les soins puissent être assurés pour tous, comme c’est le cas dans le système de santé français. Mais au-delà de cela et de manière plus universelle on devrait pouvoir s’assurer que les ressources sont allouées correctement, pour les soins les plus efficients et de meilleure qualité.
La notion d’efficience suppose une évaluation rigoureuse des produits, dispositifs et procédures médicales, mais également des problèmes de santé qu’ils sont censés prévenir ou traiter. Pour que cette évaluation soit rigoureuse elle doit être libérée d’influences extérieures aux intérêts des patients et elle doit être mise en œuvre avec une prudence critique.
Si les produits, les procédure, les dispositifs médicaux sont correctement évalués nous ne garderons que ceux qui assurent les meilleurs résultats pour les patients et ceux-ci pourront alors faire des choix, dans le colloque avec leur médecin, sur la base d’informations fiables.
Une troisième voie : comprendre plutôt que croire
Car beaucoup de nos représentations, de nos croyances, adoptées par facilité, commodité ou par intérêt, s’avèrent fausses à la lumière d’un examen critique. Après un tel examen critique nous ne nous y accrocherons que si elles nous apportent des bénéfices réels.
Stephen Hawking, le fameux physicien, a dit avec beaucoup de justesse :
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